Des jeunes filles disparaissent des quelques maisons établies dans les environs de la forêt et de son lac. Un fermier, qui est surtout un père aimant, n’a pas l’intention d’abandonner : chaque matin, il fouille les environs à la recherche de son enfant. Un beau jour, il tombe sur une fille, Anna, flottant inconsciente à la surface du lac, un étrange médaillon autour du cou. Sa femme et lui l’adopteront, en dépit de la famine qui guette la famille… Anna ne remplacera pas leur enfant disparue, pourtant, elle sera accueillie comme la chair de leur chair. Sans souvenir de son passé, la jeune fille n’aura de cesse de s’interroger. Quel est cet étrange corbeau qui vient lui rendre visite une fois la nuit tombée ? Qui est cet homme encagoulé qui marche dans la forêt ? Et cette sorcière qui assure ne lui vouloir que du bien, peut-elle vraiment la croire ?
Nimuë nous emporte dans une fable, un conte aurait-on presque envie de dire, où tous les protagonistes ne sont pas ce qu’ils paraissent. Nous, lecteurs, suivons la jeune fille avec le sentiment qu’il faut se méfier de chacun. Le danger semble rôder autour d’Anna mais l’héroïne de cette histoire ne peut s’empêcher d’enquêter. Plus elle avancera, plus le mythe arthurien sera exploité. Excalibur, Merlin… apparaîtront dans une nouvelle forme, au sein d’une narration que l’on pourrait qualifiée d’osée tant certains faits et personnages sont complètement reconstruits pour cette histoire. La BD devient alors une lecture appréciable pour le lecteur lambda et une œuvre bien plus travaillée pour les connaisseurs de la légende du Roi Arthur. Les similitudes et les différences seront passées au peigne fin par l’œil avisé de ces lecteurs qui éprouveront un intérêt supplémentaire à parcourir cette revisite du mythe d’Excalibur.
Le petit bémol, car il y en a un à nos yeux, reste cette quatrième de couverture qui annonce la véritable identité d’Anna. Nous n’y avions pas prêté attention avant notre lecture, et se rendre compte, au fil des pages, de qui est vraiment Nimuë nous a d’autant plus charmés. Les dernières cases ayant, dans cet ordre d’idées, bien plus d’impact.
Le style graphique est lui aussi le fruit d’une réflexion intéressante. On jurait avoir devant les yeux des planches peintes, et les tons de couleurs accentuent d’autant plus ce côté « conte/fable » défini par son artiste Aldara Prado. Avec Nimuë, l’autrice espagnole voit pour la première fois l’une de ses créations publiées chez Casterman, et la réussite, du moins critique, devrait être au rendez-vous.
Note : 7/10
R.L.